L’odeur qui se dégage de la salle d’attente est exactement la même qu’hier, que la semaine dernière et des mois qui la précède. Une senteur d’éther, de produits médicamenteux, qui s’entremêlent pour contrecarré les plans des microbes qui prolifèrent tel une reproduction de fourmis. On a beau les stopper, trouver des remèdes que l’on pense bénéfique à l’organisme vivant qu’est l’humain mais une fois que les cellules sont touchés, il est difficile de revenir en arrière. Peu importe vos ressource e croyance en cette essence que les gens nomment Dieu, peu importe votre espérance de revenir en arrière pour changer les choses que vous auriez dû faire il y a bien longtemps. Chaque prise de décision à un impact que votre avenir, c’est comme ça et tu le sais mieux que quiconque. On ne peut revenir au sein même de l’antérieur mais on peut regarder vers le ciel, essayer de le toucher du bout des doigts et se dire qu’ainsi le futur ne peut être que meilleur. Les jambes croisées sur le fauteuil d’un cuir d’un bleu pâle, tu attends patiemment que ton tour vienne. Les rendez-vous à la clinique restaient pour toi le parfait reflet d’un parcours de santé, un simple pli à prendre comme si tu cousais l’ourlet de ton jean finalement. A ton coté, ton frère ainé tape du pied comme s’il cherchait un rythme approprié à l’impatience de son inquiétude. Depuis son retour, Adam se donnait corps et âme dans l’affaire de votre défunt père mort quelques semaines plus tôt. Beaucoup d’objectifs s’inscrivaient dans les volontés de votre paternel mais également dans celles de ton frère ainé. Il désirait rattraper le temps perdu à ton coté, apprendre à combler ce qu’il avait pu manquer, savoir te détourner d’un destin qui ne devait pas être le tien, ajuster sa protection à la jeune femme dynamique et pleine de vie que tu étais devenue à son insu et ce en dépit des liens que vous avez maintenus malgré la distance. Ta mère avait du mal à se remettre de la disparition de votre père et tu sais que te voir lui faisant penser à l’inévitable alors tu prenais soin de ne pas la croiser ces temps-ci. Les mains posées sur ses genoux, il regarde fixement le balatum d’un blanc immaculé qui recouvre le sol. Tu arques un sourcil en l’observant tout en lui donnant un léger coup de coude. « Adam, je t’ai dit que je pouvais m’y rendre seule, j’ai l’habitude de gérer ça tu sais. ». Lui dis-tu le plus naturellement du monde avec sincérité en espérant atténuer sa nervosité à ton sujet.  Tu avais une sainte horreur des regards de tristesse et compassion que pouvez te jeter autrui mais cela était encore pire lorsqu’il s’agissait des membres de ta propre faille. Il soupire en te jetant une œillade noire, avant de croiser les bras sur son torse. Signe avant-coureur qu’il était inutile de discuter. Fichu caractère, penses-tu pour toi-même ! « Il est en retard ce médecin, j’espère qu’il en est pas de même pour ces compétences médicales. ». Son assertion était catégorique, sérieuse. Ton frère venait parfaitement d’éluder le sujet de conversation sur lequel tu aurais désirais t’étendre soit celui de la facturation de tes traitements. Il voulait absolument te financer ces derniers, te garantir les meilleurs soins, veiller sur toi, te protéger comme il l’avait toujours fait. Un sujet de dialogue où vous ne parveniez jamais à trouver un accord même tacite. Tu ne lui en voulais pas car dans le fond, il ne désirait que ton bien mais tu aurais apprécié qu’il accepte également ton point de vue. Tu lèves les yeux au ciel tout en secouant la tête, l’air amusé glissant sur les traits de ton visage. « Je n’en sais pas plus que toi, c’est le nouveau remplaçant du neurochirurgien qui s’occupait de mon cas. ». Dis-tu en haussant les épaules, ton regard se perdant à nouveau sur les nombreuses personnes du corps médical qui ne cessaient de faire des allées et des venues au sein du corridor principal que tu connaissais aussi bien qu’eux. La voix de ton frère devient alors un fond sonore lointain, presque léger. Tu te revois encore dans ce même couloir, assise sur la chaise de fortune qui se trouve au coin. Tu attendais car ton médecin avait besoin de parler avec tes parents. A cette époque-là, ton père était encore cette petite ride qui lui plisse le front lorsque l’émotion menace de le submerger. Il avait anticipé le pire, alors que toi tu le connaissais déjà. « … Léo … Léo, tu m’écoutes ou bien … ». Tiré de ta songerie passagère, tu retournes ton attention sur le visage de ton frère, la mine quelque peu soucieuse. « … ton cellulaire vibre dans ta poche. ». Lui dis-tu doucement en désignant le portable dans la poche de son costume bleu et noir. L’expression peinte sur ton visage et emplit de vérité, de force et de détermination ce qui efface certainement l’inquiétude de ton frangin à ce moment-là. Ton énergie ne cesse de se revendre, ta force de caractère transpire la volonté. Cependant tu n’en oublie pas que tu es humaine avant tout et que tu possèdes des failles malgré tout. Perdre la vie t’effraie, tes sentiments te fragilisent quelques fois mais tu les gardes à l’abri des regards. Perdre la vie t’effraie, mais pas ce pourquoi tu te bats.

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« Quand tu parlais de quelques choses de changer chez toi, je m’attendais à tout sauf à ça ! ». Son timbre de voix est perplexe et surpris tout à la fois. Installé à la terrasse d’un café où vous vous êtes donnés rendez-vous, ses bras sont posés sur les accoudoirs de son siège, un sourire facétieux et joueur inscrit ses traits détendus et familiers. Loin des blouses blanches et des résultats médicaux annonciateurs de mauvaises nouvelles, Neal était bien loin de la place de neurochirurgien qu’il occupait au quotidien, une vision qu’il fallait au moins voir une fois dans son existence pour prendre conscience de la sincérité et de  la bienfaisance de sa présence. Son sourire de loup s’élève davantage alors que tu lui hausses les épaules en souriant, les lèvres serrées en une ligne mince. Finalement ton passage chez le coiffeur avait au moins le don de déclencher l’hilarité de ton voisin de table, contrairement à ta colocataire ou même ne serait-ce que ta figure maternelle qui avait eu un choc plus que toute autre chose. A cette pensée, tu secoues la tête d’un mouvement négatif pour occulter sa réaction. Tu prends place sur le siège en face du jeune homme, tes lunettes de soleil cachant l’éclat de tes yeux, le soleil te faisait légèrement mal aux yeux et cela n’arrangeait guère les maux de crâne qui t’accompagnaient toujours en demi-teinte ces dernières semaines. Ton traitement avait encore changé et les effets secondaires venaient toujours t’embrasser comme une octogénaire dévorant ses petits-enfants de baisers. « Qu’est-ce qui t’a pris tout à coup ?! ». T’interroge-t-il tout en faisant signe au jeune serveur que votre commande pouvait être prise en charge. « C’est d’un compliqué et d’une bêtise en même temps mais ça finira par repousser de toute manière … ». Déclares-tu d’un ton léger comme si ce changement était aussi banal que de mettre une lettre à la poste. Son regard inquisiteur lui donne un air sérieux et curieux  et tu sais qu’il ne lâchera tout simplement pas l’affaire. Que cela soit dans sa fonction de simple citoyen ordinaire ou bien en tant que jeune neurochirurgien de grande renommée, Neal domptait sa détermination d’une poigne de fer dans un gant de velours. Une magnanimité d’orateur et de faits qui faisaient de lui une personne complexe et attachante mais lui mettre des bâtons dans les roues étaient quelques fois sujets de discordes mais cela avait le don de te faire ricaner. Le serveur prend alors note de votre commande et sans grand étonnement tu optes pour un muffin tout chocolat accompagné d’une boule de glace à la noix de pécan. « Oh ca va, ne me regarde pas comme ça ! J’ai parié avec la copine de mon frère que si les Lakers perdaient le prochain match, j’irai faire un tour chez le coiffeur. Voilà le résultat … ». Grognes-tu légèrement boudeuse, une moue que l’on accorderait sans faille à une gamine de huit années. Tu t’accoudes contre le rebord de la table en bois, relevant finalement tes lunettes de soleil sur le sommet de ton crâne, scrutant toujours le rire moqueur de ton interlocuteur. Son sourire était si peu visible à la clinique que tu profitais de chaque seconde de ce dernier qui se faisait bien trop rare selon toi. Il était ton médecin, celui destiné à te venir en aide, celui qui doit te donner une chance de perspective pour un avenir que tu vivais comme si chaque jour était le dernier, celui qui retiré tes chèques à chaque fin de mois comme prévu. Pourtant entre vous, tout à aller bien au-delà d’un simple lien entre une personne membre de l’ordre des médecins et de sa patiente. Tu l’appréciais bien, même plus que bien. Tu étais joviale – comme tu le demeures au quotidien – mais  avec lui ton cœur – sans savoir réellement pourquoi – palpite un peu trop vite. « On peut dire que l’expression se couper les cheveux en quatre prend de son sens. ». Dis-tu en levant les yeux vers le haut de ta tête pour désigner ta chevelure, tout en rigolant amusé. « Personnellement, je trouve que ça te va bien. Cela te ressemble. ». Son intonation est posée et franche alors qu’il s’est lui aussi appuyé contre le rebord de la table. Il te considère d’un petit clin d’œil, cet éternel sourire de malicieux accroché aux commissures de ses lèvres. Une esquisse se dessine sur ta bouche tout naturellement. Tu ne connaissais que très peu de choses de sa vie finalement, mais le principal et l’existentiel tu le voyais à chaque fois dans l’ombre intense de ses yeux. C’était suffisant.